Une étude réalisée par des scientifiques de l’Université
d’Oxford sur l’ensemble des grands barrages construits dans le monde
entre 1934 et 2007 se conclut sur un verdict sans appel : ces ouvrages
entraînent systématiquement des dépassements budgétaires et des délais
supplémentaires considérables. Régulièrement dénoncés pour les
destructions environnementales, les conflits et les atteintes aux droits
humains qu’ils occasionnent, les grands barrages ne seraient-ils donc
même pas viables économiquement ?
Les
chercheurs ont étudié 245 projets de grands barrages dans 65 pays -
tous ceux construits entre 1934 et 2007 pour lesquels des données
fiables étaient disponibles. Ils concluent que les trois quarts des
projets ont connu des dépassements budgétaires. Le dépassement
budgétaire moyen sur les 245 projets est de 96%. Les délais
supplémentaires moyens par rapport au planning initial des chantiers
sont de 44% en moyenne. Et on ne constate aucune tendance à
l’amélioration au cours du temps.
En conclusion, les auteurs de l’étude estiment que « même sans
prendre en compte les impacts négatifs sur la société humaine et
l’environnement, les coûts de construction des grands barrages en
eux-mêmes sont trop élevés pour générer un rendement positif. Les grands
barrages nécessitent des périodes de temps démesurées pour leur
construction, ce qui les rend inefficaces pour résoudre des crises
énergétiques urgentes. » Ils ajoutent : « Les leçons des erreurs
passées ne sont pas tirées (...). Les prévisions de coût des barrages
faites aujourd’hui ont autant de chance d’être erronées qu’elles
l’étaient entre 1934 et 2007. »
Les éléments et les conclusions de l’étude (en anglais, accès payant) sont disponibles ici.
En conclusion, les chercheurs recommandent aux gouvernements désireux
de construire ou faire construire de grands barrages sur leur
territoire de tenir compte de ces risques considérables de dépassement
de coûts et de délais dans leur planification - ce qui risque fort de
rendre la plupart des projets non-économiques et de les empêcher de voir
le jour...
Certes, l’étude ne tient pas compte des facteurs politiques et
environnementaux qui servent parfois à légitimer la construction de
grands barrages, notamment le souci d’une certaine souveraineté
énergétique. Pour les gouvernants, la construction de grands barrages
est également source de prestige politique, voire de cohésion nationale.
D’un point de vue environnemental et climatique, les barrages ont
souvent été présentés comme une source d’énergie relativement propre,
mais cette affirmation est de plus en plus questionnée (Lire Les barrages hydroélectriques, source de gaz à effet de serre).
Publié par Dajaltosa - Source : Olivier Petitjean - — Photo : International Rivers CC
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