MICROPOLLUANTS
Comment gérer les substances toxiques à de faibles concentrations Micropolluants, substances cancérigènes, composants neurotoxiques et
perturbateurs endocriniens ont progressivement investi les magazines de
santé. Un rapport de 2013 de l’Organisation mondiale de la santé et du
Programme des Nations unies pour l’environnement ...
– State of the Science of Endocrine Disrupting Chemicals, 2012 , February 2013 – a estimé que les perturbateurs endocriniens (à eux seuls) représentent "une menace mondiale pour la santé humaine et l’environnement".
Ils pourraient en tout cas être en grande partie responsables de
l’augmentation de nombreux troubles et pathologies (infertilité, cancers
hormono-dépendants, diabète, etc.) observés à travers le monde durant
ces dernières décennies. Mais de quoi parle-t-on ? Quel risque
représentent-ils pour les milieux aquatiques ? Comment anticiper et agir
contre les pollutions ?
Baptiste CASTEROTchargé de mission Pollution toxique– AESN
Le Dictionnaire encyclopédique des Sciences de l’eau (François Ramade, Édiscience) définit le micropolluant comme "un polluant présent à faible concentration dans l’environnement", en précisant : "la
plupart des micropolluants appartiennent au groupe des polluants
xénobiotiques caractérisés par des effets toxicologiques importants même
s’ils sont à des concentrations très faibles."
Nous retiendrons que : 1. le micropolluant est un polluant toxique,
susceptible de provoquer des perturbations, des altérations des
fonctions d’un organisme vivant, entraînant des effets nocifs dont le
plus grave est la mort ; 2. le micropolluant est présent dans
l’environnement à des concentrations de l’ordre du microgramme par litre
; 3. le micropolluant est plutôt d’origine synthétique mais peut être
également naturel dans le cas des métaux (mercure, cadmium) ou des
métalloïdes (arsenic). Revenons immédiatement sur ces trois
caractéristiques.
Le micropolluant est un polluant toxique
On distingue deux types essentiels de toxicité : la toxicité aiguë lorsque le polluant cause la mort ou des désordres physiologiques importants immédiatement ou peu de temps après l'exposition ; la toxicité chronique
lorsque le polluant cause des effets irréversibles à long terme par une
absorption continue de petites doses de polluants, ou des effets
cumulatifs.
On distingue par ailleurs les effets toxiques à seuil de dose, quand les
dommages sur un organisme apparaissent au-delà d'une certaine dose, des
effets toxiques sans seuil de dose, qui désignent des effets de
micropolluants pouvant agir quelle que soit la dose, quand par exemple
une seule molécule suffit à provoquer un effet adverse dans une cellule,
potentiellement néfaste pour l'organisme, par exemple suite à une
mutation de l'ADN. Cette catégorie regroupe les produits CMR
(cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques).
Le degré de toxicité d’un polluant de l’environnement pour un organisme
vivant dépend : de la toxicité intrinsèque de la substance ; de la
stabilité de la substance dans l’environnement (persistance, rémanence,
dégradation abiotique…) ; de l’exposition (biodisponibilité,
dégradation…) et des voies de pénétration ; de la quantité et de la
durée d’exposition ; de son devenir dans l’organisme (métabolisation,
bioaccumulation…).
Le micropolluant est présent dans l’environnement à des concentrations de l’ordre du microgramme par litre
1 μg, c’est un millième de milligramme. Ce qui fait qu’un 1 μg/L, c’est
l’équivalent de quelques grammes de sucre cristallisé dans une piscine
olympique.
Un micropolluant est plutôt d’origine synthétique mais peut être également naturel dans le cas des métaux (mercure, cadmium) ou des métalloïdes (arsenic)
Les micropolluants sont souvent classés par familles chimiques : les
métaux (cadmium, plomb par exemple) et les métalloïdes (arsenic) d’une
part ; les organiques d’autre part (comme les dérivés du benzène, les
polychlorobiphényles ou PCB, les phtalates, les bisphénols, les
organochlorés…) ; et, entre les deux, les organo-métalliques.
Mais ils peuvent être également classés par usages : les plastifiants,
les détergents, les pesticides, les biocides, les produits
pharmaceutiques…
Enfin, pour une définition complète, nous préciserons qu’un
micropolluant n’est pas un micro-organisme. Sont ainsi exclus de la
définition les virus, les bactéries, les cyanobactéries, etc., ainsi
également que les polluants dits "classiques" : les matières en
suspension, l’azote, les nitrates, le phosphore…
NOTIONS RÉGLEMENTAIRES
La réglementation liée aux micropolluants est foisonnante. Les micropolluants se trouvent au carrefour de beaucoup de textes législatifs, dans une réglementation complexe, assez imbriquée portant sur les autorisations de mise sur le marché, les autorisations de rejets, et sur l’environnement (eau, milieux aquatiques, usages de l’eau).
La DCE (directive cadre européenne sur l’eau) fixe des substances prioritaires communes à l’échelle européenne et exige de chaque bassin de déterminer leurs propres micropolluants significatifs complémentaires.
Le droit français a intégré la réglementation européenne en structurant la stratégie du gouvernement français dans des plans nationaux d’actions comme le Plan micropolluants, ou de façon particulière sur les PCB ou encore dans l’actualité récente des perturbateurs endocriniens.
NOTIONS RÉGLEMENTAIRES
La réglementation liée aux micropolluants est foisonnante. Les micropolluants se trouvent au carrefour de beaucoup de textes législatifs, dans une réglementation complexe, assez imbriquée portant sur les autorisations de mise sur le marché, les autorisations de rejets, et sur l’environnement (eau, milieux aquatiques, usages de l’eau).
La DCE (directive cadre européenne sur l’eau) fixe des substances prioritaires communes à l’échelle européenne et exige de chaque bassin de déterminer leurs propres micropolluants significatifs complémentaires.
Le droit français a intégré la réglementation européenne en structurant la stratégie du gouvernement français dans des plans nationaux d’actions comme le Plan micropolluants, ou de façon particulière sur les PCB ou encore dans l’actualité récente des perturbateurs endocriniens.
Le parcours d’un micropolluant
Le micropolluant, une fois fabriqué ou généré fatalement, puis relargué,
va passer de l’environnement aux espèces vivantes – et à l'homme, par
différents canaux environnementaux : l'air, le sol, l'eau. L’eau n’est
pas le premier vecteur de contamination pour la santé humaine, même si
cela est variable selon les micropolluants considérés. En revanche, elle
est un bon révélateur des micropolluants que l’on peut retrouver dans
d’autres compartiments environnementaux (les sols ou l’air).
Comment les micropolluants arrivent-ils dans l’eau et les milieux
aquatiques ? Le schéma simplifié des sources d’émission, des voies de
transfert dans notre environnement, et des rejets vers les milieux
aquatiques pourrait être le suivant.
Des exemples pris sur le bassin Seine-Normandie donnent une idée des principaux rejets constatés ainsi que les améliorations enregistrées.
S’agissant des rejets industriels, des efforts importants
ont porté sur la gestion des effluents industriels notamment sur les
métaux lourds et les solvants halogénés. Ainsi les efforts entrepris
dans le traitement de surfaces et dans la métallurgie (réglementation,
traitement des effluents, rejet zéro…) ont permis d’enregistré une forte
diminution des teneurs en cadmium depuis les années 1980. En revanche,
les rejets de solvants chlorés et dérivés de benzène représentent
désormais une part importante des rejets industriels ; les apports en
nickel et nonylphénols sont également significatifs.
En milieu urbain, les habitants contribuent
quotidiennement de façon non négligeable au rejet de micropolluants par
leur consommation de produits d’entretien (l’eau de javel, les
détergents, les peintures), de cosmétiques ou de médicaments. S’y
ajoutent évidemment les rejets de diverses activités économiques
artisanales ou industrielles, les transferts des matériaux urbains (les
fameuses toitures en zinc de Paris), l’entretien des espaces verts, etc.
Sur les plus grosses stations d'épuration du bassin, 14 des 20
substances les plus rejetées sont des métaux ; pour les stations plus
petites, le zinc, le cuivre, le chlortoluron, le diuron et l’oxadiazon
sont les plus retrouvées.
Les actions à la source de maîtrise de déversement des micropolluants
dans les systèmes d’assainissement permettent de réduire les rejets vers
les rivières. Depuis plusieurs années, les rejets de micropolluants
dans les réseaux d’assainissement ont ainsi été réduits par diverses
actions : la campagne Pressings sans perchloréthylène, la récupération
des amalgames dentaires pour le mercure, la gestion des déchets pour les
garages (HAPs)…
Le volume des rejets est significativement augmenté par temps de pluie. C’était le cas il y a quelques années avec les rejets de plomb, imputables au carburant des véhicules automobiles. Les programmes de recherche sur le bassin engagés au sein de l’observatoire OPUR (observatoire des polluants urbains en Île-de-France) ont permis depuis deux décennies d’approfondir notre connaissance des apports par temps de pluie. Ses principales thématiques actuelles sont la maîtrise à la source de la contamination des eaux pluviales urbaines, l’utilisation des ressources alternatives à l’eau potable en ville, le développement de nouvelles méthodes pour le suivi et la caractérisation des contaminants, la modélisation intégrée des flux polluants.
Par ailleurs, les programmes de recherche PIREN-Seine et GIP Seine-Aval
contribuent à apporter un éclairage sur les stocks de pollution
constitués dans l’environnement depuis des décennies et potentiellement
"remobilisables" dans les rivières. La datation d’une carotte de
sédiments à l’aval du bassin de la Seine témoigne des activités humaines
passées : le pic de pollution en HAP (1960) correspond à l’utilisation
du charbon en France (confirmation sur d’autres sites en France). De
même, des traces de mercure qui provenaient du bouclage des plumes
d’aigrette à destination des chapeaux par les vapeurs de mercure peuvent
être révélées dans des carottes de sédiments dans les dépôts de crues
de la Seine. Des stocks de pollution dans l’environnement ont été
constitués par les activités et pratiques passées (sédiments, produits
de dragage des ports et chenaux de navigation, sites pollués…). Les
molécules hydrophobes sont généralement les plus concernées (PCB, HAP,
étains cations, métaux). Il reste assez difficile d’estimer la part de
pollution dite "remobilisable" qui pourra engendrer un impact sur les
écosystèmes aquatiques. Cela reste une voie d’amélioration de
connaissances importante. Des stocks de ce type dans l’environnement
ainsi que les apports des rivières et fleuves du continent constituent
des sources de pollution importantes de micropolluants pour les milieux
marins.
---
Bassin Seine-Normandie
La stratégie d’actions de l’Agence de l’eau
ANTICIPER ET AGIR
L’Agence de l'eau Seine-Normandie organise une approche parallèle : ANTICIPER et AGIR.
ANTICIPER – Il s’agit de prévenir les pollutions par une véritable stratégie de surveillance de la pollution dans les milieux ; d’améliorer la connaissance sur les micropolluants et les contaminations et de financer des projets de recherche.
L’Agence de l’eau est responsable du suivi de la qualité des eaux sur
son territoire. Le nombre de micropolluants recherchés n’a cessé de
croître, passant de moins de 100 dans les années 1970, à près de 500
dans les années 1990 et près de 900 fin des années 2000. Aujourd’hui
cette recherche s’inscrit dans une stratégie de surveillance pour la
rendre plus efficace (des points de vue technique et économique).
La stratégie de surveillance des eaux superficielles est en lien avec
les cycles du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux
(SDAGE).
État écologique | État chimique | |
---|---|---|
Cycle de gestion N | Campagne exceptionnelle Recherche ponctuelle d'une liste élargie de micropolluants dans des conditions techniques optimales |
Sélection de micropolluants intégrant une liste de vigilance – Watch List |
Cycle de gestion N+1 | Surveillance régulière dans le cadre des réseaux DCE des micropolluants pertinents à surveiller pour le bassin | Surveillance des micropolluants de la Watch List |
Cycle de gestion N+2 | Sélection et surveillance de la liste des polluants spécifiques de l'état écologique pour les micropolluants significatifs du bassin | Amendement de la liste des substances prioritaires DCE |
Une stratégie comparable est développée pour les eaux souterraines.
En complément de la stratégie de surveillance des milieux aquatiques, l’Agence est impliquée ou mène des programmes de recherche et d’études : les programmes de recherche (OPUR, Piren-Seine et GIP Seine Aval) soutenus par l’agence de l’eau ont parmi leurs axes prioritaires l’amélioration des connaissances en micropolluants et la compréhension des mécanismes de contamination de l’eau et des milieux aquatiques ; par ailleurs, des études particulières sous maîtrise d’ouvrage Agence ou aidées financièrement viennent compléter ce volet connaissance (devenir des précurseurs des composés perfluorés, produits des ménages, impact sur le littoral...) ; enfin, la surveillance ponctuelle des émissions de substances (rejets des stations d’épuration ou des industriels) ou les données de vente en agriculture permettent également de suivre les sources d’émissions
AGIR – L’objectif du ministère de l’Écologie et des agences de l’eau est d’éliminer ou réduire les micropolluants le plus à l’amont possible notamment pour éviter un traitement des effluents coûteux ou non adapté dans des stations d’épuration dont l’objectif n’est pas de traiter ces pollutions.
Plusieurs outils sont mobilisés, qui relèvent de la réglementation européenne et française : autorisations de mise sur le marché, directives émissions / milieux / usages ; plans nationaux (micropolluants, résidus de médicaments, PCB, Écophyto). S’y ajoutent les aides publiques (des agences de l’eau), la fiscalité écologique (redevances des agences, redevance pour pollution diffuse, redevance pollution d’origine non domestique) et diverses actions d’éducation et de sensibilisation.
Les aides financières octroyées par les agences de l’eau visent à inciter les maîtres d’ouvrage à la réduction de la pollution et des rejets à la source. Cela peut concerner la réduction à la source des rejets des industries (technologies propres, développement de la maîtrise des connaissances par la profession), la maîtrise des apports par temps de pluie (gestion de la pollution en amont, amélioration des pratiques d’entretien, aménagements urbain et rural), ou encore la maîtrise des déversements dans les réseaux d’assainissement (collecte et élimination des déchets concentrés toxiques, maîtrise des rejets de l’artisanat et PME, incitation des collectivités, amélioration des pratiques).
En complément de la stratégie de surveillance des milieux aquatiques, l’Agence est impliquée ou mène des programmes de recherche et d’études : les programmes de recherche (OPUR, Piren-Seine et GIP Seine Aval) soutenus par l’agence de l’eau ont parmi leurs axes prioritaires l’amélioration des connaissances en micropolluants et la compréhension des mécanismes de contamination de l’eau et des milieux aquatiques ; par ailleurs, des études particulières sous maîtrise d’ouvrage Agence ou aidées financièrement viennent compléter ce volet connaissance (devenir des précurseurs des composés perfluorés, produits des ménages, impact sur le littoral...) ; enfin, la surveillance ponctuelle des émissions de substances (rejets des stations d’épuration ou des industriels) ou les données de vente en agriculture permettent également de suivre les sources d’émissions
AGIR – L’objectif du ministère de l’Écologie et des agences de l’eau est d’éliminer ou réduire les micropolluants le plus à l’amont possible notamment pour éviter un traitement des effluents coûteux ou non adapté dans des stations d’épuration dont l’objectif n’est pas de traiter ces pollutions.
Plusieurs outils sont mobilisés, qui relèvent de la réglementation européenne et française : autorisations de mise sur le marché, directives émissions / milieux / usages ; plans nationaux (micropolluants, résidus de médicaments, PCB, Écophyto). S’y ajoutent les aides publiques (des agences de l’eau), la fiscalité écologique (redevances des agences, redevance pour pollution diffuse, redevance pollution d’origine non domestique) et diverses actions d’éducation et de sensibilisation.
Les aides financières octroyées par les agences de l’eau visent à inciter les maîtres d’ouvrage à la réduction de la pollution et des rejets à la source. Cela peut concerner la réduction à la source des rejets des industries (technologies propres, développement de la maîtrise des connaissances par la profession), la maîtrise des apports par temps de pluie (gestion de la pollution en amont, amélioration des pratiques d’entretien, aménagements urbain et rural), ou encore la maîtrise des déversements dans les réseaux d’assainissement (collecte et élimination des déchets concentrés toxiques, maîtrise des rejets de l’artisanat et PME, incitation des collectivités, amélioration des pratiques).
LES REDEVANCES VISANT À LIMITER LES REJETS DANS L'ENVIRONNEMENT
Redevance pour pollution diffuse – Y sont assujettis les distributeurs de produits phytosanitaires (liste de micropolluants / substances actives) Redevance pour pollution d’origine non domestique – Y sont notamment assujettis les industriels. La première redevance sur la toxicité aiguë a été initiée en 1975 ; elle a été complétée en 1994 par une redevance sur les Métox (métaux toxiques) et AOX (composants organohalogénés). |
Les enjeux dans le bassin Seine-Normandie
L’état des nappes souterraines – La qualité chimique des
nappes reste assez stable voire s’améliore lentement depuis la dernière
évaluation officielle en 2009. Cependant 77 % des masses d’eau
souterraine sont en état chimique médiocre. Les micropolluants les plus
concernés sont les pesticides et métabolites, qui affectent 68 % des
masses d’eau. Les autres micropolluants (solvants halogénés, métaux,
hydrocarbures) concernent 20 % des masses d’eau.
L’état des rivières – Deux points de vue diffèrent selon
que l’on considère ou non les HAP (hydrocarbures aromatiques
polycycliques). Il s’agit de résidus de combustion d’hydrocarbures, pour
l’essentiel, ces résidus proviennent de pollutions atmosphériques, via
la retombée des fumées, ou du lessivage des routes qui entraîne les
résidus de pneus. Les doses présentes sont infinitésimales, mais leurs
effets sur le milieu naturel sont mal connus. Les gestionnaires de l'eau
ont peu de prise sur cette pollution qui vient de sources multiples).
Sans ces HAP, seules 41 masses d’eau de rivière sont alors déclassées et
les rivières du bassin peuvent donc être considérées à 92 % en bon
état chimique. Mais ce constat reste à nuancer ; cette évaluation
officielle ne porte que sur un nombre limité de substances et se base
uniquement sur l’eau, alors que les polluants peuvent se cacher dans les
sédiments des rivières.
Les PCB – Les polychlorobiphényles (PCB), aussi appelés
biphényles polychlorés (BPC), ou encore parfois improprement dits
"pyralènes", du nom commercial d'un produit de Monsanto à base de PCB et
autrefois très utilisé dans les transformateurs, forment une famille de
209 composés aromatiques organochlorés dérivés du biphényle. Les PCB
sont persistants et bioaccumulables : ils sont de fait plus présents
dans les sédiments ou les organismes vivants que dans l’eau : il faut
donc surveiller à l’endroit où c’est pertinent. Même si leur fabrication
et leur utilisation est interdite depuis 1987, les PCB sont encore
présents dans des concentrations toujours préoccupantes sur le bassin
Seine-Normandie. Ils posent encore aujourd’hui des problèmes
environnementaux et sanitaires du fait des dépassements de seuil,
notamment en estuaire de Seine. Les zones à risque sont les axes Seine,
l’Oise, l’estuaire de la Seine et quelques rivières.
Les métaux et métalloïdes – Les métaux sont également des
micropolluants plutôt hydrophobes. Les eaux sont globalement faiblement
contaminées (essentiellement par le zinc et le cuivre ou par chrome,
titane, sélénium, vanadium et cobalt). Au niveau des sédiments (stocks),
la contamination actuelle est plus probante et localisée principalement
sur l’axe Seine, l’Oise et quelques rivières. Néanmoins, les
concentrations des métaux les plus toxiques diminuent dans les moules de
baie de Seine et globalement la tendance est à la baisse dans les
sédiments. Cette tendance à la baisse est comparable à celle observée
sur d’autres rivières comme le Rhin.
Les alkylphenols – Obtenus par obtenus par l'alkylation de
phénols, ces composés sont utilisés massivement comme précurseurs de
détergents, comme additifs de carburant et lubrifiants, comme polymères,
et comme composants des résines phénoliques. Ce sont également des
briques de base pour produire des parfums, élastomères thermoplastiques,
antioxydants, matériaux retardateur de flamme. Du fait de leur
utilisation pour produire des résines alkylphénoliques, les alkylphénols
se trouvent aussi dans les pneus, adhésifs, revêtements, papier carbone
et caoutchoucs haute performance. Ce sont aussi des composés
relativement hydrophobes. Si les eaux apparaissent globalement peu
contaminées (ils sont probablement imparfaitement détectés), une forte
imprégnation des sédiments est toutefois nettement constatée, toujours
sur l’axe Seine, l’Oise et quelques rivières. C’est une famille
problématique dans la mesure où les émissions dans l’environnement sont
très diffuses. Le constat est assez similaire pour les phtalates et le
DEHP (plastifiants) même si les voies d’émissions prépondérantes ne sont
pas tout à fait similaires.
Les pesticides – De nombreux pesticides sont détectés dans
les rivières : parfois plus de 30 pesticides au même point de mesure
(sur aussi plus de 450 pesticides recherchés au total). Les principaux
pesticides concernés sont des herbicides et les triazines, ou leurs
produits de dégradation, ainsi que des urées substituées (isoproturon…)
ou leurs produits de dégradation. On trouve à la fois des pesticides
autorisés, mais aussi des interdits persistants dans le milieu. Ces
pesticides interdits proviennent essentiellement des nappes d’eau
souterraine et des stocks dans les sols et les sédiments. La
contamination dans les nappes est aussi importante ; 77 micropolluants
dépassent au moins une fois la norme de potabilité en moyenne annuelle.
Les résidus de médicaments – Les concentrations sont
quasiment infinitésimales. Par exemple, le paracétamol, médicament le
plus consommé, avec quelque 3 000 tonnes par an en France soit environ 1
000 tonnes par an sur le bassin Seine-Normandie : les concentrations
relevées dans l’eau du robinet sont inférieures à 100 nanogrammes par
lite (ng/L) ; en d’autres mots, il faudrait ainsi boire 2 litres par
jour pendant plusieurs milliers d’années pour absorber l’équivalent d’un
cachet de paracétamol de 100 milligrammes ! L’écart de plus d’un
facteur 100 avec les concentrations qui seraient à risque sanitaire et
celles retrouvées au robinet dans plusieurs continents fait que l’OMS,
sur la base des connaissances actuelles, ne juge pas utile l’édiction de
normes eau potable pour les résidus médicamenteux.
Et les perturbateurs endocriniens ? – La dénomination
"perturbateur endocrinien" ne vise pas une famille chimique de
micropolluants (PCB, HAP…) ou encore une famille de produits
(médicaments…) mais l’ensemble des micropolluants suspectés de perturber
le système endocrinien, le développement cérébral et les fonctions de
reproduction notamment. Parmi les micropolluants déjà cités, certains
PCBs, métaux (Cd, Pb), médicaments, pesticides, alkyphénols ou encore le
TBT (les tributylétain qui ont été massivement utilisés dans les années
1960 et 1970 comme pesticides mais aussi dans le traitement des coques
de navires) ou le DEHP sont suspectés d’être des perturbateurs
endocriniens. Les médicaments ne le sont pas tous. Il faut certainement
être vigilant sur les plastifiants, les biocides, les détergents. Si,
pour les médicaments, les concentrations en rivières sont de l’ordre du
nanogramme par litre, pour les perturbateurs endocriniens, on peut
globalement dire que les concentrations dans l’eau des rivières peuvent
aller jusqu’au microgramme par litre (μg/L). Mais cette problématique de
perturbation est plus ambiguë, sournoise car beaucoup d’aspects peuvent
entrer en compte comme par exemple l’âge et sensibilité du récepteur.
Les micropolluants nous imposent de gérer les contaminations du passé
et, en même temps, d’anticiper et de connaître les pollutions de demain,
les polluants émergents. Ils nous imposent aussi "de faire" avec les
polluants ubiquistes, apportés d’autres écosystèmes, tels les PCBs, DDT
et autres PBDEs, retrouvés dans les organismes des ours polaires.
C’est là, jusque dans les glaces arctiques, que s’imprime désormais notre empreinte chimique..
Publié par Dajaltosa - Source : Association H2O
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